Propos recueillis par Marie-Pierre Chavel
Dans le modèle de Biocoop, qu’est-ce qui peut être repris dans le « monde d’après » ?
Ce que Biocoop promeut depuis 35 ans est aujourd’hui au cœur de l’actualité et des préoccupations sociétales : la bio, la relocalisation, le local, le lien avec son alimentation d’un point de vue qualité, mais aussi social et sociétal...
Ce qui n’est pas encore suffisamment repris, c’est notre modèle coopératif multi-acteurs. La coopération est essentielle pour répondre à des problématiques complexes, par exemple comment allier écologie et social. Il va bien falloir que tout le monde échange à court terme avec ses parties prenantes, les intérêts divergents, etc. pour construire le moyen et le long terme.
Là, Biocoop est un beau laboratoire avec ses groupements de producteurs, ses salariés, ses consommateurs, ses magasins, unis pour développer l’agriculture bio dans une logique de commerce équitable, donc de collectif et de coopératif.
« La coopération est essentielle pour allier écologie et social »
Cette crise va-t-elle donner naissance à un nouveau Biocoop ?
Je ne pense pas que la crise ait fait émerger un nouveau mode de société ; elle ne fait qu’amplifier un mouvement qui existe, tourné vers le local, la bio, les circuits courts, les justes rémunérations du travail des producteurs. Je ne suis pas certain que nous assisterons à un changement structurel global, mais je pense que nous pouvons avoir confiance dans le modèle que nous défendons depuis l’origine.
De nombreux consommateurs ont franchi la porte de nos magasins durant la crise ; nous ne faisons plus peur à certains d’entre eux ; nos engagements sont plus lisibles aujourd’hui et cela renforce notre crédibilité auprès d’un public élargi.
Deux notions s’ancrent fortement dans la société : le caractère politique et citoyen de l’acte d’achat, car les gens se disent désormais qu’ils peuvent changer les choses par leur consommation, et la volonté de consommer moins, mais mieux, ce qui est complètement le projet de Biocoop.
« La crise amplifie un mouvement qui existe, tourné vers le local, la bio, les circuits courts, les justes rémunérations du travail des producteurs »
Le monde de demain selon Biocoop, est-ce une utopie ?
Comme la bio en était une pour certains il n’y a pas si longtemps encore…
Le label bio est aujourd’hui reconnu. Mais pour une bio locale, paysanne, solidaire, il y a encore à faire. Le commerce alimentaire est agressif. Concurrence, prix bas… Il faut avancer sur la coopération avec les agriculteurs et sur le prix juste, qui intègre notamment les externalités positives et négatives que dégage le produit.
Pour ses nouvelles batailles, Biocoop doit trouver de nouvelles alliances, s’ouvrir, peut-être faire rentrer des consommateurs individuels dans sa gouvernance, se coordonner avec le monde de l’entreprenariat social, dont le Mouvement des entrepreneurs sociaux (Mouves) qui souhaite être le pendant social du Medef.
La nouvelle utopie, c’est de concilier le développement de Biocoop avec un projet qui défende le moins mais mieux, donc une forme de décroissance, le lien social, la qualité des produits, le bien-être au travail... Un projet vecteur de richesses, pas seulement économiques.
Retrouvez Pierrick de Ronne dans le n°112 de CULTURESBIO, le magazine de Biocoop, distribué gratuitement dans les magasins du réseau, dans la limite des stocks disponibles, ou à télécharger prochainement sur le site de Biocoop.